Superman ou Supermenteur ?

Un frisson me parcourt, il monte progressivement le long de ma colonne vertébrale, c’est comme une décharge électrique forte, grisante, envahissante qui va finalement atterrir sur le centre de ma tête. Le choc va arriver et j’essaye par tous les moyens de le réprimer. Je respire posément, je ferme les yeux et m’imagine plongée dans une douce lumière. Peine perdue ! l’obscurité est trop grande, elle m’envahit et ce venin meurtrier enfoui en moi finit par trouver son chemin et tel un volcan à haute amplitude ma colère se déverse…

Après l’ouragan, je m’écroule épuisée.

« Viens-moi en aide, je t’en prie j’en ai marre d’avoir des épisodes de colères aussi fortes. »

« Pourquoi tu ne veux pas te mettre en colère ? »

« Je fais du mal aux gens que j’aime. »

« Et toi ? »

« Comment ça moi ? »

« Ton corps s’exprime, il veut te dire quelque chose et toi tu veux le bâillonner pourquoi ? »

« Et alors, de quoi je me mêle, je suis une résiliente. J’ai toujours pu m’en sortir toute seule et je le ferai encore ! »

« Pourtant tu viens de demander de l’aide ou je me trompe ? »

Cet article est rédigé dans le cadre du festival La Croisée des blogs organisé ce mois-ci par Xolali Zigah avec pour thème Résilience ou déni.

La perfection ça me connaît, on a fait un bout de chemin ensemble et je sais reconnaitre sa morsure constante. Bien faire les choses pour être au top professionnellement, bien tenir une maison pour être sûr qu’une poussière ne reste pas enfouie sous le sofa, bien se tenir en société, être cultivée, sophistiquée, intellectuelle. Pouvoir concilier vie professionnelle, familiale, personnelle et sociale sans tache tout en perfection. J’étais un vrai couteau suisse, une superwoman des temps modernes. Bonjour l’ego !

Puis est venu le temps de l’orage, des épreuves de la vie qui savent vous enlever toutes vos illusions et vous vider complètement de toute votre énergie. J’étais une épave, un bateau qui chavirait et je ne voyais pas de phare à l’horizon. J’étais seule face à mon destin. Il fallait agir.

Selon Oscar Chapital Colchado (2011) « La résilience est la capacité qu’un individu a de générer des facteurs biologiques, psychologiques et sociaux pour résister, s’adapter et se fortifier, face à une situation de risque, générant une réussite individuelle, sociale et morale. »

Une fois enfermé dans cette belle prison dorée sociale, on est comme un insecte pris dans une toile d’araignée. Il fallait s’adapter, alors j’ai appris et progressivement je trouvais des solutions pour sortir de mon état dépressif. J’avais souvent mal aux nerfs, j’ai décidé que cette maladie n’était plus la mienne, j’avais un bébé de qui je devais m’occuper à temps plein, il n’y avait pas de place pour les ulcères d’estomac, les névralgies ou quoi que ce soit, je devais rester en santé. J’avais tout le temps envie de pleurer mais mes journées de 28h ne me donnaient pas d’espace alors j’ai appris à réprimer mes pleurs pour avoir la force de travailler. J’avais fait faillite, il fallait trouver de nouveaux prospects à qui proposer des services, je me suis vendue professionnellement chez un goujat qui me traitait comme de la merde et criait sur moi et mes employés, juste parce que j’avais besoin d’argent pour vivre et payer mes charges. J’ai encaissé les coups en silence, je suis restée alors que j’avais envie de partir. Je devais me reconstruire. Je me suis réfugiée dans la lecture pour ne pas perdre la boule et je faisais du sport chaque matin à 5h. L’amour m’a soutenu, la famille et la musique.

Un jour, alors que j’étais en exil dans un autre pays, je me suis réveillée, je ne sentais plus rien. Plus de ressentiment, plus de douleur, plus de peur, plus de rancune. Juste une douce paix et la sérénité d’y être arrivée. Je me sentais LIBRE et Nouvelle, c’était la nouvelle naissance. J’avais réussi, j’étais sortie victorieuse. J’avais vaincu mes démons. Euh du moins je le croyais…

Selon Freud, le déni est la non-considération d’une partie de la réalité.

Cette partie, c’était la souffrance intense et la douleur que j’éprouvais et que j’avais décidé de mettre en couveuse, le temps de régler les problèmes du quotidien. J’avais mis pause sur la douleur, au lieu de l’affronter, je l’avais ignorée et aujourd’hui, la vicieuse, elle décide de réapparaître et me rappeler qu’il y a des fantômes à sortir du placard.

Comment j’ai su que ces émotions étaient là, elles ne m’ont pas laissé le choix et sont venues sous forme d’une colère qui arrive sans préavis et se déverse avec fureur. Au départ j’ai voulu la réprimer et l’enfouir encore plus loin, alors elle est revenue sous forme de kyste, d’affection, d’infections localisées vers la partie pubienne, lieu de plein de souffrance.

J’ai alors compris le message et décidé de lâcher prise, de rejeter la cape de superman et d’affronter cette souffrance qui sommeille. J’ai vu un psy, elle m’a dit un mot, il est temps d’exister, exister dans toutes les formes du sens, laisser votre corps exister, vos émotions positives ou négatives exister, laisser votre lumière briller sans honte de faire ombrage autour, exister sans crainte de blesser autrui.

J’ai compris. Contrôle, perfection, paraître, règles, regard de l’autre…

C’est tellement mieux de ne pas être un super Homme mais d’être simplement un Homme avec ses colères, ses frustrations, ses échecs, son bordel…et qui s’assume ! Pas besoin de porter le masque que l’on vous oblige à arborer, il est temps d’être simplement VOUS, tel que vous le percevez. Chic, bohème, asocial, tatoué, simple…

Vous avez le droit de vivre.
Vous avez le droit de pleurer.
Vous avez le droit d'être vous.
Vous avez le droit d'être en colère.
Vous avez le droit d'être vulnérable.
Vous avez le droit de perdre le contrôle.
Vous avez le droit de ne pas tout maitriser.
Vous avez le droit de croire que demain sera meilleur.
Vous avez le droit d'être débauché(e), fauché(e), délabré(e), négligé(e), saoul(e)...
Vous avez le droit de vivre aujourd'hui comme si c'était le dernier jour de votre vie.
Vous avez le droit de lâcher prise et d'EXISTER.

Imaginez un monde où tout est possible…

Qui voulez-vous être?

About Tatiana

Sans souci philosophique.

2 Comments

  1. Merci pour ce brillant conseil

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